A LA UNEACTUALITÉS

2eme édition de «la marche vers paques»- foi catholique et patriotisme : Quand l’Eglise invite à l’unité

En ce dimanche 6 avril 2025, nous nous retrouvons au lendemain de deux événements marquants : la célébration du 65ème anniversaire de l’indépendance de notre cher Sénégal et la 40ème édition de la Journée Mondiale de la Jeunesse (JMJ), placée cette année sous le thème : «Vous aussi, vous rendrez témoignage, parce que vous êtes avec moi» (Jean 15, 27). Deux célébrations qui nous donnent l’occasion de réfléchir ensemble sur un sujet essentiel : le lien entre foi catholique et patriotisme, à savoir l’engagement pour son pays.  

L’amour de son pays, de sa patrie, dans la vision de l’Église catholique, n’est pas une simple exaltation de la nation. Il ne se résume pas à brandir un drapeau ou à chanter l’hymne national avec ferveur, bien que ces gestes aient leur importance. Il s’agit plutôt d’une vertu enracinée dans le quatrième commandement : «Honore ton père et ta mère». Ce commandement s’étend à l’amour et au respect pour notre patrie. Comme le rappelle le Catéchisme de l’Église Catholique (n°2239) : «L’amour et le service de la patrie relèvent du devoir de reconnaissance et de l’ordre de la charité». Concrètement : aimer son pays c’est honorer ceux qui nous ont précédés, prendre soin de ce qui nous a été légué ; cela implique aussi de contribuer activement au bien commun tout en respectant les principes de justice et de charité.

Par ailleurs, comme nous l’enseigne Saint Jean-Paul II, «l’amour de la patrie unit harmonieusement l’ordre naturel et l’ordre surnaturel». C’est dire que notre attachement au Sénégal doit s’inscrire dans une vision plus large : celle de la fraternité universelle à laquelle nous appelle le Christ. Ainsi, le patriotisme ne doit jamais devenir un prétexte pour justifier la violence ou l’exclusion. Il doit être purifié par l’amour universel, cet amour qui transcende les frontières et les différences pour unir les hommes en Dieu.

Malheureusement, nous constatons dans notre contexte sénégalais que le patriotisme est souvent détourné de son sens véritable. Les discours politiques, les échanges sur les réseaux sociaux et parfois même les conversations quotidiennes sont souvent marqués par la violence verbale, les insultes, la haine et l’exclusion.

Certains invoquent l’amour du pays pour justifier des comportements qui divisent notre nation. Quel paradoxe ! Comment peut-on prétendre aimer le Sénégal tout en semant la discorde entre ses enfants ? Comment peut-on prétendre aimer son pays tout en dénigrant systématiquement ceux qui pensent différemment ? Un patriotisme authentique n’oppose jamais «nous» contre «eux». Il cherche plutôt ce qui unit, ce qui rassemble, ce qui élève. Il ne divise pas, il construit des ponts et des passerelles.

Le thème de la Journée Mondiale de la Jeunesse (JMJ) nous interpelle directement : «Vous aussi, vous rendrez témoignage». Pour nous, catholiques sénégalais, ce témoignage passe aussi par la façon dont nous aimons notre patrie et servons nos concitoyens. Saint Paul nous encourage à «ne pas nous conformer au monde présent» (Romains 12, 2). Dans notre contexte, cela signifie refuser la logique des insultes, des violences verbales, de la déshumanisation de l’adversaire politique, du collègue, d’un frère ou d’une sœur. Notre témoignage se manifeste lorsque nous dialoguons avec respect, lorsque nous cherchons à comprendre avant de juger, lorsque nous reconnaissons la dignité de chaque Sénégalais, quelles que soient ses opinions et ses origines.

Pour le chrétien, le patriotisme est service, à l’image du Christ qui n’est pas venu pour être servi, mais pour servir. Aimer le Sénégal, c’est s’engager concrètement pour son développement, c’est contribuer à son épanouissement spirituel et matériel, c’est défendre les plus vulnérables de notre société.

L’indépendance que nous célébrons n’est pas seulement politique ; c’est aussi une invitation à nous libérer des passions destructrices, des préjugés, des haines héritées ou fabriquées. Notre pays a besoin d’un patriotisme de communion, capable de faire dialoguer les différences sans les effacer, de valoriser nos diversités en les mettant au service d’un projet commun.

Les jeunes, particulièrement célébrés en ce jour, ont un rôle crucial à jouer. Vous êtes appelés à inventer un patriotisme nouveau, ancré dans nos valeurs traditionnelles sénégalaises illuminées par la lumière de l’Évangile. Un patriotisme qui ne se contente pas de mots, mais qui se traduit en actes concrets de solidarité, de dialogue et de réconciliation.

En réalité, c’est dans les petits gestes quotidiens que se construit un vrai patriotisme aux valeurs chrétiennes. Quand nous refusons de partager un message haineux sur les RS, quand nous prenons le temps d’écouter quelqu’un qui ne partage pas nos opinions, quand nous nous engageons dans notre quartier pour améliorer la vie commune, nous témoignons à la fois de notre amour pour le Christ et pour notre patrie. Le Sénégal que nous aimons ne se construit pas dans la violence des mots ou des actes, mais dans la patience du dialogue, dans la persévérance du service, dans l’audace de la réconciliation.

«Vous aussi, vous rendrez témoignage, parce que vous êtes avec moi», nous dit Jésus. Soyons ces témoins dont notre pays a besoin. Des témoins d’un patriotisme authentique, enraciné dans l’amour du Christ et ouvert à tous nos frères et sœurs.

Que Dieu bénisse le Sénégal et guide chacun d’entre nous sur le chemin d’un amour vrai pour notre patrie.

 

Par Abbé Roger Gomis

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page