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Boxe, coups Ko dans la lutte avec frappe: L’ambiguïté d’un sport à haut risque

La manière dont le lutteur de Pikine Eumeu Sène s’est écroulé, hier, à la suite du coup que Modou Lô lui a porté et les longues minutes d’inertie qui s’en sont suivies en ont inquiété plus d’un Sénégalais. Une chute spectaculaire qui pose aujourd’hui sur la table la lancinante question sur l’encadrement juridique de la lutte avec frappe au Sénégal.

En cas de décès, pourrait-il y avoir des poursuites judiciaires ? Qui serait coupable et à quel degré ? Dans ce cas de figure, une ambiguïté totale entoure la question liée notamment à la définition de cette discipline vue comme une combinaison de la lutte simple et de la boxe.

«Combinaison de la lutte simple et de la boxe »

En effet, le décret présidentiel 1969 instituant la lutte comme sport, signé par le Président Léopold Sédar Senghor et contresigné par le commissaire général aux Sports d’alors, Lamine Diack (-à cette époque il n’y avait pas de Premier ministre-), a introduit des réformes dans ce sport dit national.

Ledit texte dit ceci: «La lutte sénégalaise avec frappe est une combinaison de lutte traditionnelle et de la boxe ».

Ce qui veut dire que tout lutteur, au même moment qu’il est tenu de maitriser le ‘’Mbapatt’’, doit aussi être initié aux techniques de boxe.

D’ailleurs, le philosophe sénégalais, professeur Souleymane Bachir Diagne, a, dans une vidéo largement diffusée sur le net, reconnu que la lutte avec frappe est une invention du colonialisme.

«C’était un colon particulièrement terrifiant, qui aimait beaucoup voir les Africains se battre, il trouvait que la lutte n’était pas suffisante, il fallait épicer cela en leur demandant d’échanger des coups de poing nus », a-t-il fait savoir.  

Quoi qu’il en soit, un sport de combat à mains nues n’est pratiquement autorisé qu’au karaté, à en croire Serigne Mour Diop, journaliste spécialiste de la lutte, qui précise que même dans cette discipline, il y a des coups interdits.

«Mais, reconnait le journaliste, pour la lutte, la règlementation est limitée, même si on interdit de frapper dans les parties intimes et au niveau de la nuque». Il pense que c’est aux pratiquants d’éviter à prendre des coups.

«Quand on fait un sport de combat, on doit apprendre à faire de la parade», suggère-t-il.

« Homicide involontaire »

Par conséquent, «en cas de décès, ce serait considéré comme un simple accident », précise ce spécialiste de la lutte sénégalaise. Selon lui, «dès lors que les coups sont autorisés, les conséquences ne peuvent être considérées que comme un accident ».

Une position appuyée par un juriste contacté par Seneweb. Selon ce dernier, si un lutteur décède des suites d’un coup Ko, son adversaire pourrait être « arrêté pour homicide involontaire » comme c’est le cas lors d’un accident mortel dans la circulation.

«Bien vrai que la constitution a consacré l’intégrité de la personne humaine, mais il faut le dire, puisque la lutte avec frappe est autorisée par un décret présidentiel, donc elle est légalement reconnue », tranche-t-il.

Et de détailler : « En acceptant de pratiquer ce sport, on accepte en même temps les risques de la compétition qui sont bien mentionnés sur la licence ou le passeport sportif ».

Et, sous ce rapport, les textes du Comité national de gestion de la lutte, communément appelé Cng, semblent avoir déjà pris en compte une telle hypothèse.

Pour Thierno Ka, membre de la communication de cet organe, qui nie l’existence de cas de mort de lutteur dans l’arène, fait comprendre que les pratiquants sont protégés.

«Le port de gants dénature la lutte »

«Les textes sont très clairs la-dessus: les zones de contact pour les coups sont prévues. Il y a des interdits, c’est-à-dire les parties génitales, la nuque pour protéger le lutteur. Mais, nous sommes dans une lutte avec frappe », a-t-il rappelé.

Maintenant, puisque la lutte avec frappe fait appel aussi à la boxe, devrait-on exiger aux lutteurs le port de gants ?

Boy Kaïré, ancien lutteur, répond par la négative. Il pense que les cas de Ko sont « extrêmement » rares. «Sur 10 combats, on n’enregistre qu’un seul cas de Ko», dit-il. C’est pourquoi, bien qu’ayant dénoué son ‘’nguimb’’, il dit ne pas être d’accord avec le port du gant.

«Si on devait exiger le port des gants, ce serait dénaturer ce sport. Parce qu’avec ces gants, ce serait très difficile pour un lutteur d’attraper son adversaire. La lutte, c’est aussi des techniques spécifiques qui nécessitent l’usage des doigts », a-t-il admis soulignant que même avec des gants, il y a eu des coups Ko dans d’autres disciplines comme la boxe ou encore le karaté.

«A chaque fois qu’il y a une chute comme celle d’hier, on soulève le débat, mais après il n’y a aucune suite. Cela demande des réflexions approfondies sur ce débat», a-t-il regretté.

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