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Brexit : vers un rapprochement familial impossible pour les jeunes migrants rêvant d’Angleterre

Les députés britanniques ont récemment supprimé un amendement permettant aux migrants mineurs non accompagnés de rejoindre un parent ou un autre membre de sa famille vivant au Royaume-Uni. La mesure doit entrer en vigueur à la fin du mois, provoquant colère et inquiétude de la part de nombreuses associations. Explications.

À quelques jours du Brexit qui doit être effectif au 31 janvier, c’est un revers des plus cinglants auquel les défenseurs de la cause des migrants doivent faire face. Lors d’un vote à la Chambre des Communes le 8 janvier, les députés britanniques ont choisi d’évincer l’amendement 17 sur la protection des enfants migrants de l’accord encadrant le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE).

“C’est extrêmement décevant de voir que la première mesure concrète prise par le nouveau gouvernement de Boris Johnson est un coup de massue pour les enfants [migrants]”, a commenté Alf Dubs, membre représentant du Labour Party (parti travailliste, centre gauche) à la Chambre des Lords. “C’est aussi une véritable trahison de la tradition humanitaire de la Grande-Bretagne qui va laisser des enfants vulnérables dans des situations dangereuses que ce soit dans le nord de la France ou dans les îles grecques”, a-t-il ajouté.

Adopté en 2016 sous le précédent gouvernement de Theresa May après une campagne acharnée menée par Alf Dubs, l’amendement 17 garantissait le droit pour les migrants mineurs non-accompagnés (MNA) de rejoindre des membres de leur famille en Angleterre, y compris après l’entrée en vigueur du Brexit. L’ONU ainsi que plusieurs ONG s’alarment de la suppression de cet amendement qui représentait l’unique base de négociation entre Londres et l’UE pour la protection des migrants mineurs. 

« Aujourd’hui, le seul outil juridique dont nous disposons pour permettre aux mineurs non accompagnés de rejoindre leurs proches au Royaume-Uni, c’est le règlement Dublin 3. Avec le Brexit, il ne s’appliquera plus au Royaume-Uni et les mineurs seront dès lors privés de leur droit de rejoindre leurs proches au sens large du terme – parents mais aussi oncles, tantes, grands-parents et, surtout, frères ou sœurs. Sans Dublin, 95% des mineurs soutenus par notre association n’auraient pas pu rejoindre leur proche outre-manche”, souligne Marie-Charlotte Fabié, directrice de la branche française de l’ONG SafePassage, dans un entretien accordé à InfoMigrants.

« Seules alternatives : les passeurs ou bien sauter dans des camions »

« Ces dernières années, plus de 3 000 personnes arrivées sur le territoire européen ont ainsi pu rejoindre un membre de leur famille au Royaume-Uni », indique Marie-Charlotte Fabié. Avec le Brexit, une période de transition durant laquelle Dublin sera encore appliqué est prévue jusqu’à décembre 2020. “Après cette date, c’est le flou total depuis la révocation de cet amendement. Nous ne savons pas ce qui va se passer et nous nous inquiétons de conséquences dramatiques puisqu’il est à craindre que les seules options pour ces mineurs soient les voies irrégulières et dangereuses (passeurs, sauter dans des camions, embarquer sur des pneumatiques inadaptés) », explique encore la directrice.

Si aucun accord ou aucun cadre n’est posé dans les prochaines semaines, la seule voie légale pour les MNA souhaitant bénéficier du rapprochement familial au Royaume-Uni sera le droit britannique. Mais actuellement, il ne permet aux MNA que de rejoindre un père ou une mère. Même les frères et sœurs ne sont pas pris en compte alors qu’ils constituent une majorité des cas, selon SafePassage. “Les lois d’immigration domestiques n’offrent pas le même niveau de protection pour les enfants qui voyagent seuls que le règlement Dublin”, confirme un porte-parole de la branche britannique du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU, interrogé par InfoMigrants. “Il est absolument vital que le Royaume-Uni négocie avec les États membres de l’UE un accord qui permette aux enfants de retrouver leurs proches ici”, poursuit le porte-parole qui, tout comme SafePassage, exhorte le gouvernement à mettre en place des mesures effectives le plus tôt possible, et ce bien avant l’échéance de décembre 2020.

Un sujet qui n’a pas sa place dans les négociations sur le Brexit, selon Downing Street

À la suite du vote à la Chambre des Communes, le cabinet du Premier ministre a tenu à expliquer que l’engagement envers les enfants réfugiés n’avait pas été abandonné mais qu’il avait simplement été supprimé de l’accord encadrant le Brexit car il n’y avait tout bonnement pas sa place. Un porte-parole de Downing Street a ensuite précisé que les dispositions de l’amendement Dubs faisaient toujours partie intégrante de la politique du gouvernement mais qu’il n’était pas nécessaire d’en faire un volet de négociation spécifique dans le projet de loi sur le Brexit.

“On est clairement sur un défaut de volonté politique”, rétorque Marie-Charlotte Fabié. “Revenir sur cet amendement qui avait été voté est un signe que la protection des MNA et le rapprochement familial ne fait pas partie des priorités de ce gouvernement. Et il y a fort à craindre qu’il n’y ait aucune alternative après décembre 2020.”

Du même avis, le HCR demande au gouvernement d’amender les lois domestiques actuelles afin de simplifier la procédure de réunification familiale. Il propose notamment de donner la possibilité aux enfants réfugiés déjà présents en Angleterre de sponsoriser leur famille proche “pour qu’ils puissent reconstruire une vie ensemble”. Il s’agirait également d’élargir la définition du “membre de la famille”, notamment pour que les enfants de plus de 18 ans puissent tout de même vivre avec leurs parents au Royaume-Uni. Toutes les propositions du HCR sont regroupées dans la campagne “Families Together” soutenue par une coalition d’une quarantaine d’ONG.

Alf Dubs, quant à lui, compte bien sensibiliser la Chambre des Lords à cette problématique, dans l’espoir de récolter quelques soutiens. Un débat a d’ailleurs été ouvert mercredi 15 janvier. Cette Chambre, dont les membres sont nommés à vie par la reine sur proposition du Premier ministre, a toutefois moins de poids que les Communes. Elle a pour vocation d’examiner les projets de loi approuvés par la Chambre des Communes et peut les modifier ou inviter le gouvernement à les revoir. Elle ne dispose que très rarement du pouvoir d’empêcher leur adoption.

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