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Covid-19 : au Brésil, les scientifiques déplorent « un manque de réponse coordonnée »

Alors que l’Organisation mondiale de la santé déclarait la semaine dernière que l’épidémie de Covid-19 avait atteint « un plateau » au Brésil, le bilan continue de s’alourdir pour dépasser les 80 000 morts. La pandémie touche désormais les régions les plus reculées.

Un nouveau cap a été franchi au Brésil, lundi 20 juillet : plus de 80 000 personnes ont perdu la vie et 2,1 millions de personnes ont été contaminées, soit 1 % des quelque 212 millions d’habitants que compte le pays, selon un bilan publié par un consortium de médias brésiliens.

Ce consortium, constitué des quotidiens Estado de São Paulo, Extra, O Globo, mais aussi les sites d’informations G1 et Uol, vise à compiler de manière indépendante les données sur la pandémie de Covid-19. Une façon de contourner les tentatives du gouvernement de Jair Bolsonaro de minimiser le nombre de décès et de contaminations dans le pays.

Les chiffres du consortium sont toutefois considérés comme largement inférieurs à la réalité par la communauté scientifique, notamment en raison de l’insuffisance de tests. Selon ce consortium, le Brésil est le deuxième pays le plus touché au monde, derrière les États-Unis.

Pour l’OMS, la pandémie a atteint « un plateau » au Brésil

Si le bilan continue de s’alourdir avec 721 victimes ces dernières 24 heures et 21 749 nouvelles contaminations, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que la pandémie dans le pays avait atteint « un plateau ». Il y a « une opportunité maintenant pour le Brésil d’éliminer la transmission du virus », a déclaré le chef des urgences médicales de l’OMS Michael Ryan, lors d’une conférence de presse vendredi 18 juillet, incitant les autorités à « prendre le contrôle ».

Reste que la moyenne des décès en une semaine demeure supérieure à 1 000 par jour depuis plus d’un mois. « L’OMS parle d’un plateau, mais le problème, c’est que, malgré cette stabilité, les chiffres restent très élevés », a estimé à l’AFP Mauro Sanchez, épidémiologiste de l’Université de Brasilia. Il s’attend à ce que cette situation « perdure encore quelque temps » avant que le nombre de décès et de contaminations ne commence à baisser.

« Manque de réponse centralisée »

Il existe aussi de grandes disparités régionales dans le traitement de l’épidémie dans les 27 États du pays. « Le grand problème du Brésil est le manque de réponse centralisée et coordonnée : chaque État, voire chaque ville, fait comme il l’entend pour contrer la pandémie », décrypte pour France 24 Maria Fernanda Grassi, médecin infectiologue et chercheuse à la Fondation Oswaldo Cruz à Salvador de Bahia. « On se retrouve avec des situations très différentes », ajoute-t-elle. Conséquence : des régions jusqu’ici épargnées comme dans le Centre-Ouest, le Sud mais aussi les zones rurales, connaissent une hausse des cas de contamination.

Dans l’État de São Paulo, le plus touché du pays, les zones rurales comptent désormais le même nombre de cas de Covid-19 que dans la capitale, soit 166 000. Ces régions reculées, représentant 52,6 % de la population de l’État, comptent désormais plus de morts que la mégalopole : 5 616 depuis le début de l’épidémie, contre 5 338 dans la capitale, selon Folha de São Paulo.

Le président brésilien Jair Bolsonaro lors d'une cérémonie à Brasilia, le 20 juillet 2020.

À Minas ou à Bahia, l’épidémie repart malgré le confinement précoce

D’autres régions, qui pensaient avoir échappé au pire en prenant des mesures de restrictions très précoces, se retrouvent rattrapées. Dans l’État de Minas Gerais, la capitale Belo Horizonte avait décrété un premier confinement début avril, limitant la propagation de l’épidémie. Trois mois plus tard, une nouvelle vague a changé la donne : 91 % des municipalités de l’État ont recensé des cas, selon le quotidien local Estado de Minas, et le taux d’occupation des lits par des malades du Covid-19 dans les hôpitaux publics de Belo Horizonte atteint 91 %, d’après les autorités locales.

Même son de cloche à Salvador, capitale de l’État de Bahia : un confinement strict avait été imposé fin mars, « avec un port du masque obligatoire dans tous les lieux publics », précise l’infectiologue Maria Fernanda Grassi. « Ici, l’épidémie se dirige désormais vers l’intérieur des terres, et plus de 90 % des municipalités ont été touchées. » Elle craint désormais une surcharge des hôpitaux. « Des patients seront sûrement transférés vers Salvador, ce qui pourrait faire repartir l’épidémie », ajoute-t-elle.

Malgré cette situation inquiétante, beaucoup d’États incitent à une reprise de l’économie. São Paulo, l’épicentre de l’épidémie, a amorcé un déconfinement progressif en juin tandis que Belo Horizonte a décrété la réouverture de bars et restaurants, selon le quotidien local O Tempo. « Ce n’est absolument pas le moment », s’inquiète Maria Fernanda Grassi.

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