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Crise en Guinée-Bissau: les militaires au centre du jeu

Le bras de fer postélectoral se poursuit en Guinée-Bissau. Umaro Sissoco Embalo, qui revendique la victoire à la présidentielle, est installé au palais. Mais le PAIGC de son rival Domingos Simoes Pereira fait valoir que le contentieux électoral n’est pas tranché, et dénonce un « coup d’État ». Dans ce bras de fer qui se durcit de jour en jour, les militaires sont au centre du jeu.

Avec notre envoyée spéciale à Bissau, Charlotte Idrac

Ils n’ont pas fait de déclaration publique, mais leur présence parle d’elle-même. Les plus hauts représentants de l’armée étaient tous là, samedi, au palais présidentiel, pour la cérémonie d’investiture de Nuno Gomes Nabiam, le Premier ministre nommé par Umaro Sissoco Embalo. Le chef d’état-major, le vice-chef d’état-major, les chefs d’état-major de l’armée de terre, de l’armée de l’air, ou encore le commandant de la garde nationale, tous ont posé pour une photo de groupe devant le palais.

C’est aussi l’armée qui a assuré la sécurité de la cérémonie d’investiture organisée jeudi par Umaro Sissoco Embalo dans un hôtel de la capitale. Cérémonie à laquelle participait l’ancien chef d’état-major Antonio Indjai. La hiérarchie militaire a donc, dans les faits, choisi son camp. Dès vendredi, les forces de défense et de sécurité ont pris le contrôle des principales institutions : le palais du gouvernement qui abrite plusieurs ministères, le palais de justice, la radio et la télévision nationale. Samedi soir, c’est l’Assemblée qui a été investie. Le dispositif est léger, mais visible.

L’armée dans le passé a souvent eu un rôle politique déterminant en Guinée-Bissau. C’est elle qui était à la manœuvre lors du dernier coup d’État en 2012. Avant l’élection présidentielle de fin 2019, le chef d’état-major avait assuré que les militaires resteraient désormais « en dehors des querelles politiques ».

La Cédéao lance un avertissement à Umaro Sissoco Embalo

Dans un nouveau communiqué, la Cédéao, l’organisation ouest-africaine médiatrice dans la crise, hausse le ton. Un communiqué beaucoup plus ferme que le précédent publié samedi. Elle parle des « investitures successives de deux chefs d’État en dehors des cadres légaux et constitutionnels au moment où le contentieux électoral est pendant devant la Cour suprême ». Elle souligne « que la Cédéao ne peut pas reconnaître des organes créés et installés en dehors des cadres constitutionnels et légaux », et note « avec une grande inquiétude l’immixtion des forces de défense et de sécurité dans la sphère politique ». Elle leur demande d’observer une position de « neutralité ». Enfin, la Cédéao parle de la « nécessité absolue de s’en tenir au processus électoral en cours qui doit aller jusqu’à son terme », et évoque des sanctions.

Un communiqué qui sonne comme un désaveu ou en tous les cas comme une mise en garde pour Umaro Sissoco Embalo. Il n’y a d’ailleurs pas encore eu de réaction sans son camp et pas de nouvelle du gouvernement de Nuno Nabiam. Son entourage parlait d’une annonce rapidement, mais pour l’heure, il n’y a pas de fumée blanche.

Dans les rues, il n’y a pas de tension particulière en ville. Les commerçants sont là, il y a du monde dans les quelques cafés de Bissau. Il y a une sorte d’attente. Certains habitants sont inquiets de ce qui pourrait se passer maintenant, mais beaucoup se disent « habitués » des crises politiques au sommet.

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