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La France a expulsé des migrants malgré les mesures de lutte contre le coronavirus

Malgré le discours du président français annonçant le début du confinement pour les personnes vivant en France ainsi que la fermeture des frontières en raison de l’épidémie de coronavirus, les autorités ont expulsé cette semaine des étrangers dans leur pays d’origine et en ont refoulé d’autres à leur arrivée dans un aéroport français.

Depuis lundi 16 mars, au moins 10 personnes ont été renvoyées soit dans leur pays d’origine, soit dans le premier pays d’entrée en Europe dans le cadre du règlement Dublin, selon la Cimade.

« On a constaté des renvois depuis les centres de rétention administrative (CRA) vers le Maroc, l’Algérie, le Congo, le Mali, le Sénégal, la Roumanie, la Georgie et même les Pays-Bas pour un dubliné », précise à InfoMigrants David Rohi, responsable rétention à la Cimade.

« On risque d’exporter le virus dans d’autres pays »
« Même si les expulsions sont moins nombreuses qu’en temps normal, cela pose question car c’est en totale contradiction avec la politique générale actuelle », continue David Rohi.

En effet, l’épidémie de coronavirus qui touche la France a mené lundi 16 mars les autorités à exiger le confinement de la population ainsi que le strict respect des mesures barrières (se laver les mains régulièrement, tousser dans son coude, respecter les mesures de distanciation d’au moins un mètre). Le président a également annoncé la fermeture des frontières.

De plus, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a appelé les États touchés par l’épidémie à limiter l’exportation et l’importation du virus.

« Cette politique d’expulsion est complètement aberrante, on prend le risque d’exporter le virus dans d’autres pays », souffle David Rohi qui ajoute que de nouvelles personnes ont été enfermées dans les CRA depuis lundi.

La Cimade milite pour la fermeture des CRA en cette période de crise sanitaire, arguant que les mesures prises ne sont pas suffisantes pour protéger les personnes enfermées contre le coronavirus.

« Les personnes mangent ensemble dans les réfectoires, les mesures de distance ne sont pas appliquées, les interactions sont nombreuses », expliquait déjà David Rohi à InfoMigrants mercredi 18 mars.

« Les refoulements d’étrangers en Zapi se poursuivent »
La situation est quasi similaire dans les ZAPI, les zones d’attente pour les étrangers dans les aéroports ou les ports.

Selon l’association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), présente dans les ZAPI, « les refoulements d’étrangers se poursuivent malgré le risque d’infection dans les pays d’origine ». C’est notamment le cas à l’aéroport de Beauvais où, toujours selon l’Anafé, plusieurs personnes ont été refoulées ces derniers jours.

« Selon nos informations, il y a eu des tentatives de refoulement à l’aéroport d’Orly, de Marseille et de Toulouse les 18 et 19 mars », signale à InfoMigrants Laure Palun de l’Anafé. « De plus, les placements en ZAPI continuent. On comptait 38 personnes dans celle de Roissy mercredi, ils étaient 47 le lendemain alors que quatre personnes avaient été relâchées la veille », ajoute-t-elle. À la date du 20 mars, 53 personnes seraient encore maintenues en ZAPI.

L’association s’inquiète également de ces placements alors que dans certaines ZAPI l’accès au juge n’est pas garanti. C’est notamment le cas à Bobigny (Seine-Saint-Denis) où le juge des libertés et de la détention a suspendu ses audiences.

« Les personnes sont donc arrêtées aux frontières, placées en ZAPI et libérées après quatre jours car elles n’ont pas pu voir un juge, quel est l’intérêt ? », s’interroge Laure Palun.

D’autant que, comme dans les CRA, les mesures d’hygiène et de distanciation ne peuvent être respectées. « Si les personnes enfermées n’ont pas de symptômes, rien n’est fait. Or, on sait que même sans symptôme on peut être porteur du coronavirus. Si quelqu’un présente des symptômes, il est placé à l’isolement en attendant l’arrivée du Samu. Ce n’est pas une solution », estime Laure Palun.

L’Anafé demande donc la libération des personnes enfermées, la suspension des placements en ZAPI et des refoulements.

Contacté par InfoMigrants à plusieurs reprises, le ministère de l’Intérieur n’a pas répondu à nos sollicitations.

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