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LES COMMERÇANTS DE TIVAOUANE CRIENT LEUR DÉTRESSE

Le coronavirus (Covid-19), qui a fait son apparition en Chine en 2019, s’est ensuite répandu sur tous les continents. Pour barrer la route à ce virus qui a fait des millions de victimes, presque tous les pays du monde ont pris des mesures qui ont eu un impact sur plusieurs secteurs d’activités. C’est le cas du Sénégal où les autorités ont décidé, entre autres pendant un certain temps, d’interdire les rassemblements et de fermer les mosquées et les lieux de culte.

Cependant, l’épidémie semble en voie de décrue au Sénégal, comme en atteste les derniers chiffres transmis par le ministère de la Santé. La vie normale a, d’ailleurs, repris depuis un certain moment même si l’on exige toujours le respect des mesures barrières. Malgré cela, la confrérie des Tidianes a annoncé encore une fois qu’elle n’organisera pas son traditionnel grand rassemblement à Tivaouane communément appelé « Gamou », pour cause de coronavirus.

Depuis 1902, des milliers de pèlerins se rendent chaque année à Tivaouane, une localité située à environ 90 km à l’est de Dakar, pour célébrer la naissance du prophète (Psl). Depuis deux ans, toutefois, le Khalife a donné un « Ndiguel » qui consiste à maintenir les mosquées fermées. Ce, malgré l’autorisation de réouverture des lieux de culte en mai dernier. Par ailleurs, cette décision du guide religieux impacte forcément les commerçants qui, en période de « Gamou », voyaient leurs activités se fructifier. Le bruissement habituel causé par l’afflux incessant des pèlerins a été remplacé encore cette année par les rares clients qui viennent acheter des habits pour enfants pour préparer la rentrée des classes ou des denrées alimentaires.

Abdoulaye Dione, commerçant au marché de Tivaoune soutient que l’impact causé par la non tenue du « Gamou » est énorme. Mais, dit-il, le « Ndiguel » est à exécuter quelles qu’en soient les conséquences. « L’impact est énorme. Vous savez à l’approche de l’évènement, on empruntait de l’argent à la boutique pour acheter des articles divers et ça marchait. On faisait des rentrées d’argent énormes grâce au « Gamou », indique-t-il. D’ailleurs, poursuit-il, « j’ai une fois emprunté 7 millions que j’ai échangé avec du matériel (téléphones, chargeurs, articles divers). Après le Gamou, j’ai récolté un bénéfice de plus de 3 millions ».

Les ouvriers et les Jakartamans aussi touchés…

Même son de cloche chez Masseye Thiam. Ouvrier de son état, il avait l’habitude de déboucher les fosses en période de « Gamou » et cela lui apportait beaucoup d’argent. C’est la raison pour laquelle, dit-il, la décision du Khalife d’interdire encore une fois un rassemblement à Tivaoune aura forcément des conséquences sur son activité. « Métina torop mais sante yalla » (C’est difficile mais on s’en remet à Allah), a d’emblée indiqué le sieur Thiam. Avant d’enchaîner : « C’est difficile pour nous. Parce qu’en période de « Gamou », on m’appelait de partout pour vider les fosses. Depuis deux ans, l’activité est au ralenti. Je dois vous dire que c’est avec ce métier que je nourris ma famille. Et comme c’est la volonté divine nous ne pouvons que nous en remettre à Dieu en espérant que l’année prochaine il y aura le « Gamou ».

Les vendeurs d’habits et de tissus ont également la nostalgie de ce grand événement. C’est le cas d’Aly Mbaye. Trouvé dans sa boutique non loin du marché et installé confortablement sur sa chaise, il indique que les commerçants subissent actuellement des pertes énormes. « C’est la décision du Khalife et nous n’avons aucun commentaire à faire par rapport à cela, concède-t-il. Mais ce que je peux vous dire c’est que le « Gamou » nous manque énormément. Parce que les commerçants subissent beaucoup de pertes. En pareil moment, je renforçais ma boutique et les clients venaient comme pas possible. Toutefois, on espère faire une bonne affaire avec la rentrée des classes qui se profilent à l’horizon ». Sokhna Seynabou Mbaye, commerçante, a abondé dans le même sens que son collègue : « C’est très difficile pour nous mais comme c’est la décision du Khalife on ne peut qu’accepter. La non tenue du « Gamou » sera ressentie par les commerçants mais aussi par les fournisseurs. Parce qu’on donnait des millions aux fournisseurs pour avoir des tissus et autres articles divers. Ce qu’on gagne en période de « Gamou » on ne l’a pas en période de Tabaski. Juste vous dire combien ce grand rassemblement était rentable. Mais comme j’ai eu à le dire, nous sommes dans une ville dirigée par un Khalife et on ne peut qu’accepter sa décision ».

Outre les commerçants et les ouvriers, les conducteurs de motos Jakarta sont également touchés par la non célébration du Gamou. L’un d’entre eux, Papis, faisait des rotations sans cesse avant, pendant et après le Gamou. « On augmentait les tarifs parce que nous étions les seuls capables de prendre certains raccourcis, raconte-t-il. On quittait même Tivaoune pour aller dans les localités environnantes et cela nous rapportait beaucoup. On avait jusqu’à 20 mille francs par jour. C’est pourquoi, la non tenue du « Gamou » encore une fois cette année sera très difficile pour nous jakartamans ».

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