CONTRIBUTION

Les imposteurs

Les transhumances d’Idrissa Seck et d’Issa Sall, la « retraite politique » de Madické Niang en attente de son fromage à la mairie de Touba, ont donné plus de lisibilité sur la vraie configuration de la dernière présidentielle

« La trahison est une question de date », dit le Cardinal de Richelieu. Et trahir la volonté populaire est devenu la règle chez nos dirigeants politiques. Si aujourd’hui la pathologie de la transhumance est érigée en vertu dans notre landerneau politique, c’est parce jamais ses promoteurs ne se sont jamais souciés des dégâts éthiques qu’une telle renonciation à ses convictions et un tel déni de ses principes entraîneraient. Cette transhumance des politiciens oblitérée sous le maquignon d’une collaboration pour ne pas dire d’un collaborationnisme, est devenue fréquente au point de mithridatiser ceux qui s’intéressent encore à la politique. Les chemins de la transhumance sont plurivoques : il y en a ceux qui quittent leur parti pour tourner casaque et rejoindre le pouvoir tandis que d’autres utilisent la phagocytose-fusion pour aller goûter aux délices et bakchichs du pouvoir. Enfin, il y en a qui négocient des postes de prébendes au sein de l’État sous le prétexte de répondre à l’appel inclusif du président de la République. Aujourd’hui, Idrissa Seck est récompensé au poste du président du CESE pour avoir trompé son électorat, Issa Sall est devenu ministre-conseiller du chef de l’État pour avoir déstructuré le parti de Moustapha Sy et Madické sera nommé maire de Touba (parce qu’à Touba, le maire n’est pas élu) pour avoir tenu tête à Wade qui avait déclaré que le PDS n’avait pas de plan B sans Karim.

Après la présidentielle, les Sénégalais se sont rendu compte que sur la liste de départ, il n’y avait en face du président sortant qu’un seul vrai opposant, Ousmane Sonko, et de faux candidats pour ne pas dire de diversion. Des pseudo-candidats dont le rôle était de capter les voix qui auraient pu être thésaurisées par le leader de Pastef si l’élection ne concernait que ce dernier et le chef de Bennoo. Les transhumances d’Idrissa Seck et d’Issa Sall et la « retraite politique » de Madické Niang qui attend son fromage à la mairie de Touba lors des prochaines locales ont donné plus de visibilité et de lisibilité dans la vraie configuration de la dernière présidentielle. Quand Madické Niang avait pris ses distances avec Abdoulaye Wade qui n’avait que son fils comme candidat du PDS et personne d’autre, les libéraux avaient vite fait de conclure que cette candidature était bénie et encouragée par Macky Sall. En réalité, la candidature de Madické portait l’empreinte de Macky qui lui a cédé une bonne partie de ses parrains pour pouvoir être dans les starting-blocks.

Concernant Idy, beaucoup de Sénégalais se sont effarés lorsque le 23 décembre 2018, pendant son investiture pour la présidentielle de 2019, le leader de Rewmi a confessé qu’il ne critiquerait plus le candidat sortant. Déjà, certains analystes politiques avaient même douté à raison de la profonde conviction du sieur Seck de vouloir remporter la présidentielle de 2019. On ne peut pas battre campagne avec des bisounours et des caresses dans le sens du poil. En réalité, Idrissa Seck a floué une bonne partie de son monde, de son entourage durant toute la campagne. Il n’a jamais été contre Macky, il est avec lui. C’est son complice, c’est son compère.

Seulement, cela aurait été un danger s’il avait renoncé à sa candidature pour affirmer urbi et orbi son soutien à Macky Sall. Le fait de s’ériger légitimement premier adversaire de Macky Sall en l’absence du PDS de Karim Wade et de Taxawu Senegaal de Khalifa Sall lui ont permis de capter les voix de ces leaders au détriment de Sonko. Toutes les récriminations et autre rédaction de livre blanc post-présidentielle d’Idy n’étaient que des tape-à-l’œil, un faux combat pour mieux avaliser le score électoral frauduleux de Macky Sall.

Si Idrissa Seck a gagné Macky Sall dans le département de Mbacké qui englobe Touba avec 129 724 voix devant Macky Sall qui y totalise 67 745, c’est grâce aux voix du PDS qui sont allées gonfler ses suffrages. Si dans le département de Dakar, le leader de la Coalition Idy 2019 a fait une percée avec ses 115 612 voix derrière Macky avec ses mystérieux 212 355 bulletins de vote, il faut considérer que les 90 % appartiennent à Khalifa et à Karim. Idrissa Seck aura servi pendant la présidentielle à un simple bassin de rétention des voix du PDS et de Taxawu Senegaal qui auraient pu gonfler le score électoral de Sonko si le Rewmiste en chef avait acté sa jonction actuelle à Bennoo avant l’élection. Et ses 20,71% de la diaspora, il les doit aux leaders du PDS et de Taxawu Senegaal qui ont été écartés illégalement du scrutin présidentiel.

Aujourd’hui, il appert que les vrais candidats ayant postulé à la présidence de la République n’étaient que deux : Macky Sall et Ousmane Sonko. Idrissa Seck, Issa Sall et Madické Niang n’étaient que des écrans de fumée pour dévoyer le vote des Sénégalais qui malheureusement ont cru à leurs projets politiques tendancieux. En réalité, ils ont adopté la stratégie du containment pour capter les voix de Khalifa Sall et de Karim Wade qui, certainement, allaient remplir l’escarcelle du leader des Patriotes si leur collusion avec Macky Sall était officialisée. Il fallait tout faire pour que Sonko ne bénéficiât pas des voix des candidats écartés. Les partis qui ont noué cette forte coalition autour d’Idrissa Seck lors de la présidentielle auraient pour la plupart soutenu la candidature de Sonko si Idrissa Seck, Issa Sall et Madické avaient clarifié leur jeu.

Leur allégeance d’aujourd’hui au pape de Bennoo Bokk Yaakaar trahit la sincérité de leur projet politique de 2019. Les imposteurs sont à nu, leur jeu a été découvert. Ils ont détourné les suffrages populaires pour assurer la réélection de Macky, qui aujourd’hui leur renvoie l’ascenseur. Alors, il est clair que ces trois politiciens imposteurs ont comploté sur le dos des Sénégalais et négocié des maroquins à défaut des strapontins. Idy, Issa et Madické ont voté pour le président Macky Sall. La neutralité de Wade lors de la présidentielle a plus profité à Macky qu’à Ousmane Sonko. En l’absence de consignes de vote, les militants libéraux ont préféré accorder prioritairement leurs suffrages au leader de la coalition Idy 2019, à Macky Sall, Madické Niang plutôt que de voter pour Sonko.

Aujourd’hui, l’arithmétique électorale Macky, Idy, Issa et Madické donne 85 % selon le leader de Bennoo. Mais les récentes émeutes ont montré que ce chiffre électoral n’est que pure fantaisie détonnant avec la réalité du terrain. Et Macky qui s’enorgueillit du poids électoral de ses nouveaux-anciens alliés doit savoir que la sommation des voix de ses collabos n’est qu’un feu de paille. Et les prochaines locales qu’il redoute tant vont clarifier la véritable force de chaque leader ou de chaque coalition.

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