Mauvaise gestion, concussion, népotisme: La Sodav répond à ses détracteurs

Le conseil d’administration de la Société sénégalaise du droit d’auteur et des droits voisins (Sodav) a convié, hier, à son bureau annexe de la Cité Kër Gorgui, à une conférence de presse pour répondre aux accusations de mauvaise gestion, de concussion et de népotiste proférées dernièrement par des artistes.
Ce sont des administrateurs de la Société sénégalaise du droit d’auteur et des droits voisins (Sodav) très en colère qui ont fait face à la presse, hier, à Dakar. Déjà très remontés que certains pairs artistes aient voulu saborder leur bilan «fort élogieux et à féliciter après avoir hérité d’un Bsda exsangue», les membres du conseil d’administration ont trop peu apprécié d’être voués aux gémonies. C’est d’emblée un Vieux Mac Faye pondéré, porte-parole du jour, qui a lu le propos liminaire signé conjointement par tous les membres du conseil d’administration. Un texte qui a d’abord fait état de «l’excellent travail abattu par les instances dirigeantes (…) en termes de performance et de transparence, avec des niveaux de perception et répartitions jamais égalés ainsi qu’une maîtrise des charges annuelles».
Ils ont rappelé que le Bureau sénégalais des droits d’auteur (Bsda) a été repris avec moins de 40 millions de FCfa dans les caisses, des retards de paiements de répartition s’accumulant sur plusieurs années (435 747 339 FCfa), des créances de plus de 1, 33 milliard de FCfa et des dettes de plus de 84 millions de Cfa, entres autres.
A son actif, la Sodav se crédite de ne pas connaître de retards de paiements et d’avoir réglé 823 499 695 FCfa de créances et des endettements de plus de 61 millions de FCfa. Le total des perceptions sous la Sodav, d’octobre 2016 à 2019, a par ailleurs sensiblement connu une hausse de bien plus du double.
«L’exposé montre les excellents acquis de la Sodav, mais tend aussi à rétablir la vérité sur les allégations non fondées qui ont été portées pendant des années à l’endroit des dirigeants de la Sodav», a relayé Vieux Mac Faye, usant à souhait du ton censeur et presque paternaliste. Le deuxième point était principalement d’ailleurs l’objet de la réunion. Mais, au registre de la réplique, Malal Talla alias Fou Malade, qui a pris la parole à la suite du porte-parole du jour, a mieux appliqué le ton de la virulence. Il a d’abord tenu à signifier que si Ngoné Ndour était incompétente, les administrateurs, «des personnalités honnêtes et intègres», seraient les premiers à la vilipender.
Plainte en vue contre Le Quotidien
Concernant l’article paru dans Le Quotidien du 21 octobre dernier, Fou Malade jure qu’«aucun des propos tenus par l’auteur de l’article n’est tenu par quelque membre du conseil d’administration que ce soit». Les membres de ce conseil ont d’ailleurs informé d’une plainte pour diffamation contre le quotidien en question. «Il s’agit de débusquer la ou les taupe(s) qui s’empressent de révéler les contenus de nos réunions et, pire, les pervertissent comme des rats. Mais aussi de révéler celui ou ceux qui sont derrière ces manipulations d’informations, en avançant parfois des artistes mal informés», a éclairci Fou Malade. L’article en question aurait rendu compte de la réunion du conseil d’administration du 20 octobre dernier pour traiter des activités de la Sodav et de ses actualités. L’auteur de l’article a fait dire à Ngoné Ndour que le Chef de l’Etat a souhaité l’audit de la société, car il a des problèmes avec son frère, Youssou Ndour. Or, signalent les membres du conseil d’administration, ils se réjouissent tous de la décision du Président de la République d’accélérer le processus de mise en place de la Commission permanente de contrôle qu’ils avaient déjà appelée de tous leurs vœux et qui devait se faire depuis 2008 (tel que dicté par la Loi 2008 en son article 124), ainsi que d’une évaluation institutionnelle et financière. « Nous n’avons rien à cacher et sommes d’ailleurs heureux que cet audit puisse se faire. Seulement, c’était à l’Etat de l’engager et nous n’allions pas lui tordre le bras pour cela. De toute façon, nous publions régulièrement nos bilans sur notre site web, consultable par tous. Ce qu’aucune institution ne fait ici, et ça nous vaut d’être cité en exemple dans le monde», a soutenu Daniel Gomes de l’Association des métiers de la musique du Sénégal (Ams).
Les administrateurs entre précisions et déballages
Le Collectif «Say wi» a réussi à sortir le conseil d’administration du bois et de ses gonds. Idrissa Diop et Cie avaient accusé la Sodav d’avoir loué ou acheté tout un immeuble (Immeuble Mame Yacine à la Cité Kër Gorgui). Les administrés se défendent d’avoir juste loué un appartenant dans l’immeuble à usage de bureaux pour les services annexes, qui a d’ailleurs accueilli la conférence de presse hier. Et cette location, selon eux, est justifiée, car le siège de la Sodav qui abritait le Bsda a même reçu la visite de la Protection civile à cause de son niveau de décrépitude. «Un pan du mur est même tombé sur un vigile», a confié le comédien Matar Diouf. Ce dernier n’a d’ailleurs pas été tendre avec leurs contempteurs. Le trésorier du groupe a même tiré à boulets rouges sur Bouna Manel Fall et Idrissa Diop et rappelé que Pape (du duo Pape et Cheikh) doit encore de l’argent à la Sodav. Ce dernier, a-t-il ajouté, a perçu avec la Sodav plus d’argent qu’il n’en a jamais eu avec le Bsda. Pour le cas d’Alioune Kassé, il a relevé qu’il est impossible d’attendre une perception, alors qu’on n’est pas productif ou qu’on n’a pas de productions sur les plateformes. Matar Diouf a ainsi trouvé indécent que ces artistes puissent investir les médias pour les salir, «or il y a tellement à dire sur eux, preuves à l’appui».
Alaaji Man, l’ancien membre de Daara J, a trouvé que ceux qui parlent ne sont nullement intéressés par la vérité. Sinon, les textes leur permettent de saisir la Sodav, qui a l’obligation de répondre à toutes leurs interrogations, quelles qu’elles soient (article 123 Loi 2008). Fou Malade et Daniel Gomes pensent savoir qu’ils sont intéressés par l’argent, surtout depuis l’annonce de l’institution de la copie privée qui représente une grosse manne. «Les politiciens veulent maintenant gérer la Sodav, après que nous l’avons bien portée, parce que beaucoup de milliards de FCfa sont en vue», a noté le président de l’Ams. Pour l’argent «qu’ils supposent déjà être là», concernant le Fonds de l’action culturelle et sociale, Vieux Mac Faye a souligné que les membres du conseil d’administration sont des ayants-droit au même titre que les autres. «Il n’y a pas de secret : la liste de bénéficiaires est toujours disponible dans nos rapports. (…) De 2017 à 2019, nous avons donné en termes de d’allocation retraite, d’aides sociales, d’assistance médicale, de dons et contributions diverses un montant de 53 083 186 FCfa», signe le conseil d’administration.