Mort d’un migrant guinéen au Maroc après une intervention policière

Une intervention policière dans la forêt de Boulingo, dans le nord du Maroc, a provoqué la mort d’un migrant guinéen, samedi soir. Selon un témoin de la scène, joint par InfoMigrants, l’homme est décédé après avoir reçu un coup de matraque à la tête. Les associations dénoncent des opérations de police de plus en plus violentes.
Un migrant guinéen est mort après une intervention policière dans la forêt de Boulingo, près de Nador, dans le nord du Maroc.
« Des militaires et des policiers nous ont encerclés samedi soir et ont frappé plusieurs personnes. Un Guinéen est mort après avoir reçu un coup de matraque à la tête », explique Moussa, un migrant ivoirien qui vit dans la forêt, joint par InfoMigrants.
Les migrants présents ont ensuite manifesté pour protester contre la mort de leur camarade mais ils ont été interpellés par les forces de l’ordre et emmenés dans le centre d’enfermement d’Arekmane .
Entre 2 000 et 3 000 migrants vivent dans la forêt
« Environ 150 personnes, dont des femmes et des enfants, ont été arrêtées suite à cette manifestation », signale Omar Naji, président de l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH) Nador. « Les autorités veulent cacher la vérité, sinon pourquoi enfermer les témoins de la scène ? », s’interroge-t-il.
Entre 2 000 et 3 000 migrants, désireux de rejoindre l’Europe via l’Espagne, vivent dans la forêt de Boulingo dans des conditions dramatiques. Leurs journées sont rythmées par les interventions policières, qui se font généralement le soir, en pleine nuit.
« Les policiers viennent tous les jours. Ils nous frappent, détruisent nos camps et nous dépouillent : ils prennent notre argent, nos téléphones et notre nourriture », déplore Moussa.
Les associations assurent que les contrôles ont considérablement augmenté ces derniers mois. Les autorités ont même installé un camp permanent au cœur de la forêt de Boulingo pour pouvoir mieux surveiller les migrants.
« On demande sans cesse à la police d’arrêter de venir la nuit car la zone montagneuse est très dangereuse. Quand les migrants fuient les forces de l’ordre, ils peuvent tomber dans des ravins, faute de luminosité », avertit Omar Naji.
« Recrudescence des violences »
Selon Hassan Ammari, militant des droits de l’Homme et membre d’Alarm Phone au Maroc, les interventions policières sont, depuis un an et demi, de plus en plus violentes. « Nous sommes revenus à la situation d’il y a 10 ans », estime l’activiste, contacté par InfoMigrants. « Les choses s’étaient un peu calmées mais depuis début 2018, on assiste à une recrudescence des violences envers les migrants : agressions, refoulement vers le sud du pays, enfermement… sont leur lot quotidien ».
Selon Omar Naji et Hassan Ammari, le Maroc utilise l’immigration pour faire pression sur les États européens, notamment l’Espagne, en première ligne face à l’arrivée de migrants. « Rabat joue le rôle de gendarme de l’Europe et sert les politiques migratoires de l’Union européenne. Ils empêchent les migrants de traverser la mer en échange d’importantes subventions », souffle le président de l’AMDH Nador.
Face à l’imposante présence policière dans le nord du royaume, les migrants tentent de plus en plus le passage vers le Sud, via les îles espagnoles des Canaries.Un changement de route qui n’étonne pas les humanitaires. « Les migrants s’adaptent et trouvent d’autres moyens pour échapper à la surveillance policière », observe Hassan Ammari pour qui, « cette politique sécuritaire est ainsi vouée à l’échec ».