CONTRIBUTION

Quand c’est TAS, c’est un secret d’état, mais quand c’est Macky Sall, c’est la diplomatie

Depuis la colonisation, on assiste à un complexe des dirigeants africains envers les Occidentaux. Pourquoi les dirigeants africains respectent-ils les occidentaux plus qu’ils ne respectent leurs propres citoyens ? Pourquoi les médias occidentaux sont plus respectés que nos propres médias et certaines informations de taille sont souvent d’abord divulguées à ces médias avant nos propres médias ? Combien de fois le président Sall a-t-il accordé des interviews aux médias français concernant des sujets importants de notre pays ? La décolonisation, va-t-elle s’achever ou sommes-nous condamnés à toujours vouloir être ce que nous ne sommes pas dans la manière de nous habiller, de parler et de faire ?

Tant que nous ne croyons pas en nous-mêmes, n’espérons même pas aspirer à sortir de la pauvreté. Quand un citoyen sénégalais sort un livre pour décrier les mauvaises pratiques, on nous parle de secret d’état alors que nos députés, ministres et présidents sont toujours en train de rencontrer et de recevoir les ambassadeurs pour leur faire part des affaires les plus secrètes de notre état. Pourquoi cette hypocrisie sénégalaise ? Sont-ils plus méritants d’information que nous, citoyens sénégalais ? je vais vous raconter quelques exemples où vos dirigeants sont allés vilipender leur propre frère de patrie chez les Occidentaux qu’ils respectent plus que tout et qu’ils vénèrent à la limite.

Au cours d’un entretien, le 28 novembre 1980 avec des journalistes du Monde, le président Senghor leur avait confirmé son intention de renoncer à ses fonctions de président de la République du Sénégal. Quand le journal a publié un extrait de cet entretien dans ce sens, le premier président sénégalais n’a pas apprécié cette publication avant son adresse à la nation. Pourquoi nos présidents et membres du gouvernement ne respectent pas leur population et les médias locaux autant qu’ils respectent les occidentaux et leurs médias ? Pourquoi le président sénégalais n’avait-il pas convoqué et accordé un entretien à nos journalistes étant donné que les rumeurs circulaient déjà ?

Quand le président Wade, son Premier ministre Macky Sall et d’autres membres du gouvernement avaient rencontré des diplomates d’un pays étranger, alors que ces derniers voulaient discuter de l’arrestation d’Idrissa Seck entre autres, qu’est-ce que le président leur a-t-il dit ? Il a dit avoir payé les études d’Idrissa Seck et qu’il était peiné d’apprendre que la police avait arrêté ce dernier. Contradictoirement, il dira aussi ne pas être convaincu qu’Idrissa voulait déstabiliser le pays et que ces accusations devraient être abandonnées.

Il dira, cependant, que les accusations de corruption et de détournement de fonds étaient réelles et graves. Il a déclaré n’avoir autorisé que jusqu’à 20 à 25 milliards de FCFA à consacrer à des projets de travaux publics à Thiès, alors qu’Idrissa aurait dépensé 46 milliards de FCFA. Il ajoutera qu’en outre, de nombreux projets n’auraient pas été assujettis à des appels d’offres, contrairement à la loi sénégalaise. Il disait détenir des preuves de surfacturation et de détournement de fonds à hauteur de 16 milliards de FCFA. Il leur a même dit que la police avait trouvé une importante somme d’argent d’origine inconnue sur lui. Pendant ce temps, nos opposants, femmes et hommes de la société civile ne savaient pas encore grand-chose de ce dossier. Nous sommes toujours les derniers informés et on me dit que c’est normal.

Pendant que de brillants économistes, chroniqueurs et journalistes entre autres ont décrié et alerté sur le danger des infrastructures du PSE, les membres du gouvernement leur ont tout simplement ignoré. Quand le journal français Le Monde a publié ma tribune intitulée : « Le plan d’infrastructures de Macky Sall envoie le Sénégal droit dans le mur », le palais de la République a tremblé et le Premier ministre sénégalais a répondu en un jour de dimanche à cette tribune par une réponse polémique qui n’a été qu’une récitation des cours d’économie sur la croissance endogène. Quand ces mêmes sénégalais ont alerté sur l’affaire du pétrole, on assista au même scénario et quand l’enquête de la BBC révéla un scandale à 10 milliards de dollars, c’était presque la fin du monde au Sénégal. Pourquoi ce complexe face aux médias occidentaux ?

Quand Thierno Alassane Sall a sorti son livre qui parle de divers sujets, les journalistes ont préféré se focaliser sur les sms divulgués alors que le livre va au-delà du contrat avec Total. Nous avons entendu tous les membres du parti présidentiel sortir et dire que l’auteur n’a plus la carrure d’un homme d’état et qu’il aurait divulgué des secrets d’Etat. Lui au moins a divulgué des secrets, des faits, aux Sénégalais qu’il respecte et non aux Occidentaux comme le fait le président de l’APR.

Parallèlement, on sait tous que quand le président Diouf accédait au pouvoir, l’économie du Sénégal était paralysée par la corruption et les pots-de-vin. Il a voulu changer les mentalités des Sénégalais en moralisant le terrain politique et économique du pays. C’est ainsi qu’il mit en place la CREI en le notifiant par l’article 63 bis du Code pénal. La DÉLATION était même encouragée et toute personne qui révélait ces faits était exemptée de poursuite judiciaire. Même si le président n’a pas été suivi dans cette volonté d’assainir, au moins on peut dire qu’il a essayé.

Quand le ministre de l’Intérieur du temps, Cheikh Tidiane Sy, avait publié un communiqué de presse accusant l’ancien Premier ministre Macky Sall de blanchiment d’argent, que s’est-il passé ? Macky Sall avait reçu l’ordre de se présenter au commissariat central pour être placé en garde à vue. Tout son entourage avait commencé à paniquer et à appeler les représentations diplomatiques au Sénégal pour venir à son secours.

Son chef de protocole, Pape Samba Diop a rencontré certains ambassadeurs pour leur avertir que Macky Sall avait reçu l’ordre de se présenter au commissariat avec son conseiller en communication Abou Abel Thiam. Il ajouta même que des unités de la police de Dakar, dirigées par Modou Diagne, surveillaient sa maison depuis qu’il avait quitté le navire libéral. Pourquoi accourir vers les Occidentaux ? On ne peut pas espérer sur Dieu et sur les Hommes. C’est l’UN ou les autres.

Macky Sall, n’avait-il pas terni l’image d’Idrissa Seck pour le détruire politiquement ? En reprenant les mots de l’ancien Premier ministre quand il rencontrait les ambassadeurs, on se rend compte combien la politique peut être sale. Ne disait-il pas être convaincu qu’Idrissa Seck a détourné des fonds et s’est illégalement enrichi aux dépens du peuple sénégalais ? N’oublions pas aussi que l’équipe juridique d’Idrissa Seck a nié avec véhémence qu’un accord ait été conclu avec son mentor. Et pourtant, Macky Sall réfute cette thèse disant qu’Idrissa Seck a accepté de restituer une partie des fonds.

Il est allé plus loin jusqu’à dire qu’Idrissa Seck avait conspiré avec Abdou Latif Coulibaly pour discréditer leur mentor dans les livres de ce dernier. Il doit avoir fait du bon travail, car il est devenu la plume du président Sall. Macky Sall devait éliminer Idrissa par tous les moyens et il a même déclaré que le gouvernement poursuivait des enquêtes en France et avait transmis des commissions rogatoires au gouvernement suisse pour identifier les fonds détournés qui auraient pu être déposés dans des banques suisses. Pensez-vous une seule fois qu’un Premier ministre en Italie en France ou en Espagne aille voir un ambassadeur africain pour discuter des affaires secrètes du gouvernement ? Pourquoi ce complexe ?

Vous ne pouvez pas accomplir des changements fondamentaux sans une certaine dose de folie. Dans ce cas précis, cela vient de l’anticonformisme, du courage de tourner le dos aux vieilles formules, du courage d’inventer le futur. Il a fallu les fous d’hier pour que nous soyons capables d’agir avec une extrême clarté aujourd’hui. Je veux être un de ces fous. Nous devons inventer le futur. Thomas Sankara.

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