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LA PUISSANCE DES SOCIÉTÉS SECRÈTES EN AFRIQUE Par Sobel DIONE

La spiritualité cependant n’est pas uniquement accomplissement des rituels ; elle est aussi représentation et connaissance active. Sans doute les prêtres sont-ils ceux qui sont censés atteindre au mieux cette connaissance, mais tout homme y participe à un certain degré. Il y a une progression de la pratique des rites les plus extérieurs, liée aux représentations populaires, à la connaissance profonde à laquelle certains seulement peuvent atteindre au terme d’une longue initiation qui peut s’étendre à la vie entière.

Sans doute l’initiation est-elle d’abord un mode d’intégration à un groupe social et, la plupart du temps, elle coïncide avec les âges de la vie, notamment avec les passages de l’enfance à l’âge adulte. C’est un processus de socialisation des jeunes, qui peuvent, rassemblés en classes d’âges, passer un temps plus ou moins long, en dehors du village, à recevoir l’éducation que tout homme du groupe doit avoir. La circoncision des garçons, l’initiation des filles marquent un changement de la personne même, et l’achèvement des rites de passage est le signe d’une véritable mort et résurrection que symbolisent les mutilations corporelles et les changements de nom. Ces premières initiations, où garçons et filles sont strictement séparés, ouvrent parfois l’accès à ce qu’on a appelé les sociétés secrètes, qui sont plutôt des confréries plus ou moins fermées, attachées généralement à un culte particulier et remplissant des fonctions précises pour le compte de la société.

Chez les Bambara, le komo assure l’ordre et le maintien d’une certaine morale sociale et ses cérémonies groupent tous les circoncis du village sous la direction d’un forgeron, le komotigi, maître du sanctuaire et gardien du masque qui est le réceptacle des forces qui animent le groupe. Le komo règle la vie du village comme gardien des traditions et conservateur des mythes. Mais c’est surtout dans les régions de forêt que les sociétés secrètes sont nombreuses : leurs manifestations se font sous le couvert de masques et de vêtements véhiculant les forces de l’univers invisible. Les ancêtres et les esprits apparaissent ainsi et le vrombissement des rhombes est leur propre voix.

Chez les Sérères, les hommes et les femmes peuvent être initiés dans l’ordre secret du Saltigué. Conformément à la doctrine religieuse Sereer, pour devenir un aîné spirituel (Saltigué), il faut être initié, en particulier dans les mystères de l’univers et du monde invisible, ce qui est réservé à un petit nombre. Le Xoy est une cérémonie religieuse et un événement spécial dans le calendrier religieux des Sereer. C’est le moment où les grands prêtres et prêtresses Sereer (les Saltigués) viennent prédire l’avenir face à la communauté.

En pays yoruba, ce sont les esprits des morts qui animent la société Oro ; chez les Ibo, les membres du Mmo agissent sous l’impulsion des forces de la terre et des ancêtres ; au Gabon, l’initiation au bwiti doit permettre de dégager les neuf corps de chaque individu qui correspondent aux neuf sphères de l’univers. Certaines de ces associations regroupent tous les hommes de la société, à des stades différents d’initiation, d’autres sont plus sélectives.

SobelDione chercheur et historien serere

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