Tokyo 2021: la Biélorusse Krystsina Tsimanouskaya a reçu un visa humanitaire de la Pologne
rfi
L’athlète biélorusse Krystsina Tsimanouskaya avait déclaré dimanche 1er août avoir été forcée à suspendre sa participation aux Jeux olympiques de Tokyo et à quitter le Japon, après avoir critiqué sa fédération sur les réseaux sociaux. Elle a reçu plusieurs offres d’asile. Elle a effectué une demande auprès de la Pologne, qui lui a accordé ce lundi 2 août un visa humanitaire.
L’athlète biélorusse « est déjà en contact direct avec des diplomates polonais à Tokyo. Elle a reçu un visa humanitaire. La Pologne va faire tout le nécessaire pour l’aider à poursuivre sa carrière sportive », a écrit Marcin Przydacz sur Twitter.
Tsimanouskaya est « en sécurité dans l’enceinte de notre ambassade à Tokyo, a-t-il précisé à la chaîne d’information TVN24. La Pologne offre son soutien aux citoyens bélarusses qui, pour des raisons politiques, souhaitent quitter le territoire bélarusse ou ne veulent pas retourner au Belarus. »
Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, cités par des médias polonais, l’athlète pourrait voyager vers la Pologne cette semaine.
Son mari Arseni Zdanevitch, contacté par téléphone par l’AFP, a indiqué avoir quitté le Bélarus, car il ne pense pas y être « en sécurité ». « Je me trouve en territoire ukrainien, et je prévois de retrouver ma femme », a-t-il ajouté.
Selon Alexandre Opeikin de la Fondation bélarusse pour la solidarité sportive (BSSF), une organisation soutenant les sportifs bélarusses dans le collimateur de Minsk, Krystsina Tsimanouskaya avait « rempli des documents pour obtenir l’asile politique en Pologne ». « Elle est OK, elle tient bon, a déclaré Alexandre Opeikin. C’est clairement une situation stressante, pas seulement pour des sportifs mais pour quiconque subirait une telle pression. »
Krystsina Tsimanouskaya était allée ce lundi à l’ambassade de Pologne à Tokyo, avaient affirmé des médias nippons.
Par ailleurs, d’autres pays européens ont offert d’accueillir l’athlète biélorusse, dont la Slovénie et la République tchèque. « Les autorités japonaises viennent de nous confirmer que l’athlète Krystsina Tsimanouskaya avait reçu notre offre d’asile », a déclaré le ministre tchèque des Affaires étrangères Jakub Kulhanek sur Twitter. « Les Jeux olympiques ne sont pas une affaire de politique, les méthodes du régime [d’Alexandre] Loukachenko sont absolument honteuses », a-t-il ajouté en faisant référence au président du Bélarus, dont la réélection en 2020 pour un sixième mandat avait déclenché un mouvement massif de contestation populaire dans le pays, réprimé depuis par le pouvoir.
« En sécurité »
« Je demande au Comité international olympique de m’aider, j’ai subi des pressions et on essaye de me faire partir du pays sans mon accord », a déclaré l’athlète de 24 ans dans une vidéo sur Instagram dimanche 1er août. « Je demande que le CIO intervienne », a ajouté Krystsina Tsimanouskaya. Selon son récit, elle a été transportée de force à l’aéroport par des membres de l’équipe de Biélorussie pour être embarquée à bord d’un vol de la compagnie Turkish Airlines, a rapporté notre correspondant à Tokyo, Frédéric Charles.
Dans la soirée de dimanche, la Fondation biélorusse de solidarité sportive affirmait que Krystsina Tsimanouskaya se trouvait dans la soirée à l’aéroport Haneda de Tokyo, terminal 3. « L’athlète biélorusse est en train d’être évacuée de Tokyo par la force », a affirmé cette Fondation sur Telegram, en précisant avoir sollicité l’intervention de la police japonaise pour empêcher ce départ. La Fondation a assuré ensuite que la jeune femme avait été placée sous protection policière et qu’un représentant du ministère japonais des Affaires étrangères se rendait à l’aéroport pour la rencontrer. L’athlète envisageait alors de demander l’asile politique auprès de l’ambassade d’Autriche à Tokyo, selon cette même source.
La sprinteuse a affirmé dans la soirée être « en sécurité », sous protection policière. « Je suis en sécurité et on est en train de décider où je vais passer cette nuit », a déclaré l’athlète dans un communiqué publié sur Telegram par la Fondation biélorusse de solidarité sportive, précisant qu’elle se trouvait dans un poste de police à l’aéroport de Tokyo. Une information confirmée par le porte-parole du gouvernement japonais Katsunobu Kato ce lundi. Krystina Tsimanouskaya a finalement passé la nuit dans un hôtel de l’aéroport de Haneda.
Critiques contre la fédération biélorusse
Pour sa part, le comité olympique biélorusse dirigé par Viktor Loukachenko, fils du président Alexandre Loukachenko, a assuré dans un communiqué que la sportive avait dû suspendre sa participation aux JO sur « décision des médecins, en raison de son état émotionnel et psychologique ». Une déclaration qualifiée aussitôt de « mensonge » par l’athlète devant la presse à l’aéroport.
Krystsina Tsimanouskaya a violemment critiqué cette semaine la Fédération biélorusse d’athlétisme, en affirmant avoir été forcée à participer au relais 4×400 mètres alors qu’elle était censée initialement courir le 100 mètres et le 200 mètres, car deux autres athlètes n’avaient pas réalisé un nombre suffisant de contrôles antidopage, selon elle. « Je n’aurais jamais réagi de manière si sévère, si on m’avait prévenu à l’avance, expliqué toute la situation et demandé si j’étais capable de courir un 400 mètres. Mais on a décidé de tout faire dans mon dos », a-t-elle écrit dans un post Instagram.
Pour Anatol Kotov, responsables des affaires internationales à la Fondation pour la solidarité avec les sportifs biélorusses, « ce qui vient de se passer montre de nouveau au monde très clairement que le régime biélorusse n’accepte aucune sorte de critique, car la situation avec Krystsina Tsimanouskaia était un problème uniquement sportif et n’avait aucune connotation politique au début. Les autorités biélorusses l’ont transformé en problème politique. À ce jour, trente athlètes biélorusses ont dû fuir leur pays ».
Depuis des mois, le régime d’Alexandre Loukachenko poursuit sans relâche une répression visant opposants, journalistes et militants, avec l’espoir de mater définitivement le mouvement de contestation historique de 2020 contre sa réélection à un cinquième mandat.
(Avec AFP)